Chipoter, faire une baise, pistolet… 10 belgicismes qui n’ont pas du tout le même sens en France !

Ah, les faux amis… On les croyait réservés aux langues étrangères, mais ils existent aussi en français, selon le pays où on le parle. Le français de Belgique en compte un certain nombre, qu’il vaut mieux connaître pour éviter malentendus et situations cocasses. Les dix mots suivants, qui existent en français de France, ont donc leur sens propre dans le plat pays. Nous vous invitons à les découvrir et, pourquoi pas, à les adopter !

1 – Chipoter

En Belgique, « chipoter » a d’autres significations qu’en France. Il signifie « farfouiller » (chipoter dans un tiroir), « passer son temps à de vagues occupations » (chipoter autour de sa moto, à sa moto) et également « manier sans soin » (Arrête de chipoter tes cheveux !). En France, dans ce sens, on emploie tripoter, triturer, trafiquer, traficoter

2 – Cloche

Si un Belge vous dit qu’il a des « cloches » au pied, ne cherchez pas des cloches de Pâques ! Cela signifie qu’il a des ampoules. Tiens, un autre mot polysémique (qui a plusieurs sens) ! Faut-il y voir une analogie avec la forme d’une cloche ? Y a-t-il un lien avec l’expression « à cloche-pied » ? Une déformation du nom cloque semble plus probable. En effet, en ch’timi, les sons [che] et [que] sont souvent confondus. Souvenez-vous de Kad Merad, ne comprenant rien (enfin, « rin » !) au récit de Dany Boon dans Bienvenue chez les Ch’tis…  

3 – Dîner

En Belgique, à 13 h, on ne déjeune pas, on dîne ! C’est aussi le cas au Canada, en Suisse, au Congo, au Burundi, au Rwanda… et anciennement en France, avant que n’apparaisse la tradition du petit-déjeuner. Et le soir, que fait-on alors ? On soupe ! Récapitulons : chez les Belges, on déjeune, on dîne, on soupe ; en France, on petit-déjeune, on déjeune, on dîne.

? Les verbes dîner et déjeuner sont proches et pour cause, ils ont la même étymologie : le latin disjunare, « rompre le jeûne ».

4 – Faire une baise

Un(e) Belge veut vous « faire une baise » ou vous « donner une baise » ? Rassurez-vous (ou pas), ce n’est pas une proposition indécente ! Ici, une baise est un petit bisou affectueux, une bise, à une lettre près ! Ainsi, « faire une baise », c’est faire la bise. D’ailleurs, en ancien français, baiser signifiait « embrasser », il en est ainsi dans ce vers de Louise Labé, datant du XVIe siècle : « Baise m’encor, rebaise-moi et baise ». À noter que les Ch’tis, eux, disent « baisse », de même sens.

Dans le même esprit, l’expression « tirer son plan » n’a aucun rapport avec « tirer son coup » ou « avoir un plan (Q) » ! En Belgique, mais aussi dans le nord de la France, en République démocratique du Congo et au Rwanda, « tirer son plan » signifie « se débrouiller, se tirer d’affaire ».

5 – Frotteur

En Belgique, le frotteur n’est pas un agresseur sexuel qui sévit dans les transports en commun, mais un instrument (généralement une petite brosse) servant à essuyer un tableau noir, ou plutôt « vert », selon le terme en usage. 

6 – G

Ne vous méprenez pas, il ne s’agit pas du célèbre point érogène féminin, mais de l’abréviation de GSM, pour « Global System for Mobile Communications ». Initialement, le GSM est une norme numérique de téléphonie mobile, en Belgique, il désigne le téléphone portable. À l’inverse, quand on parle de « portable » à Bruxelles, on évoque plutôt un ordinateur.

? En Suisse, un téléphone portable est un natel. Le mot a fait son entrée dans Le Petit Robert 2021.

7 – Pistolet

Si, dans une boulangerie belge, vous entendez parler de « pistolet », pas de panique, vous n’êtes pas (forcément) en plein braquage ! Dans le plat pays, un pistolet est un petit pain au lait qui a une forme oblongue (allongée), comme celle d’un pistolet ! Dans le même ordre d’idée, un sandwich contenant de la viande et des frites est une… mitraillette. Une « guerre » verbale bien plus redoutable que celle qui sévit dans l’Hexagone entre le pain au chocolat et la chocolatine !

8 – S’il vous plaît

En Belgique, mais aussi au Luxembourg et dans le nord de la France, il n’est pas rare d’entendre « s’il vous plaît », non pour introduire ou ponctuer poliment une requête, mais pour dire « voici, voilà » (en présentant quelque chose, un plat au restaurant, par exemple) ou encore pour faire répéter (il équivaut à « pardon », « plaît-il »). Plus troublant encore pour les Français, « s’il vous plaît » s’emploie aussi au sens de « merci ». Un commerçant belge peut dire « s’il vous plaît » en vous rendant la monnaie, par exemple.

9 – Savoir

En Belgique, on utilise fréquemment « savoir » dans le sens de « pouvoir, être capable », ce qui peut entraîner une certaine incompréhension outre-Quiévrain*. Par exemple, si un Belge vous dit qu’il ne « sait pas » marcher, ce n’est pas qu’il n’a pas appris quand il était bébé, bien sûr, cela veut dire qu’il ne peut pas. De même, si un Belge vous dit qu’il ne « sait pas » lire (inutile de le renvoyer à l’école), qu’il ne « sait pas » venir chez vous (inutile de lui adresser un plan)…

*En Belgique, cette expression désigne la France.

10 – Torchon

Si, en France, le torchon sert à essuyer les mains ou la vaisselle, il a, en Belgique, un tout autre usage : celui de nettoyer le sol ! En effet, le nom torchon désigne une serpillière. Cette acception est également en vigueur au Luxembourg. À noter que dans le nord de la France, la serpillière est une wassingue (on prononce « ouassingue »).

À lire également : Biloute, braire, dracher… Parlez-vous « ch’timi » ?

Sandrine Campese

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