Dexter, Matrix, Hibernatus : ces titres de films et de séries en latin

Ringard, le latin ? Difficile à croire au regard des nombreux films et séries populaires dont le titre est en latin. Science-fiction, péplum, comédie, policier, biopic… aucun genre ne résiste à la langue de Cicéron !

Dexter, si « droit » que cela ?

 Les nombreux fans de la série Dexter, du nom du personnage principal Dexter Morgan, savent-ils que ce mot latin signifie « droit », par opposition à sinister (gauche) ? Attribué à un tueur en série qui sévit la nuit, ce nom a tout l’air d’un contraptonyme (un nom à contre-emploi) ! Eh bien, détrompez-vous : le droitier Dexter est un homme de principes. Il suit scrupuleusement le code légué par son père Harry, qui énonce notamment qu’il ne faut pas tuer d’innocents. Dexter a également donné « dextérité », une qualité indispensable à celui qui, le jour, est expert médico-légal en projections de sang. De l’habileté, il en faut aussi pour découper un corps en morceaux, le faire disparaître et camoufler une double vie !

En réalité, la langue morte avait déjà la cote en 1985, année de sortie de Terminator de James Cameron. Littéralement, le latin terminator signifie « celui qui termine », pour ne pas dire qui « ex-termine », dans le cas du cyborg joué par Schwarzenegger ! Les Québécois ont préféré Terminateur, alors que le terme caractérise, en astronomie, la zone limite de lumière solaire à la surface de la lune.

Matrix, la mère nourricière

Puis vient Matrix des Wachowski, avec Keanu Reeves (1999). Ce mot, issu de mater (mère), désigne la femelle reproductrice. Le latin matrix est passé tel quel dans le vocabulaire anglais, d’où le titre original du film : The Matrix. Si le français a depuis longtemps traduit matrix par « matrice », l’utilisation du latin, langue source par excellence, colle parfaitement avec le sens figuré de matrix : « élément qui fournit un appui ou une structure ». En effet, dans le film, les humains sont branchés à la Matrice qui les maintient en vie dans un cocon rempli de liquide amniotique. Pas convaincus par la racine latine que l’on pouvait prendre pour de l’anglais, les Québécois ont préféré nommer le film La Matrice.

L’année suivante sort le chef-d’œuvre de Ridley Scott, Gladiator, qui désigne « celui qui combat avec le glaive » (gladius). Le mot, passé tel quel en anglais, réussit à concilier mémoire antique et superproduction américaine. Notons que le titre n’a pas été traduit en français par « Gladiateur », sauf au Québec, évidemment.

Quant à Invictus (Invaincu) de Clint Eastwood (2010), c’est le titre d’un poème de William Ernest Henley écrit en 1875. Sa lecture aida Nelson Mandela à garder espoir pendant ses vingt-sept années passées en prison. Il se conclut par les fameux vers, devenus devise du film : « I am the master of my fate. I am the captain of my soul. » (« Je suis le maître de mon destin. Je suis le capitaine de mon âme. »)

Hibernatus, le retour de l’hiberné

Dans un tout autre registre, citons le cultissime Hibernatus avec Louis de Funès (1969), dont le titre dérive du latin hibernum (hiver). Ici, l’usage d’une langue ancienne permet de contextualiser le film, de le rendre délicieusement désuet, et pour cause, il traite du retour à la vie moderne d’un « hiberné » ayant passé soixante-cinq ans dans la glace…

Enfin, notre tour d’horizon serait incomplet sans les titres de films utilisant des expressions latines, comme le péplum Quo Vadis de Mervyn LeRoy (1953), soit « Où vas-tu ? », ou le policier Mea Culpa de Fred Cavayé (2014), littéralement « C’est ma faute ».

Sandrine Campese

Crédit photo : Louis de Funès dans Hibernatus d’Édouard Molinaro (1969)

Articles liés

Répondre à Sandrine Campese Annuler la réponse

Laissez un commentaire
*


On peut aussi penser à « Gladiator », à « Invictus » ou « Nemo ».
Sans oublier bien sûr le film de Guy Debord qui emprunte à Perec son « In girum imus nocte et consumimur igni »

    Bonjour pat, avez-vous lu l’article ? Il est bien question de Gladiator et d’Invictus ;-). En revanche, je ne connaissais pas ce titre latin du film de Guy Debord, qui est aussi un palindrome (peut se lire dans les deux sens). On peut le traduire par : « Nous tournons en rond dans la nuit et nous sommes dévorés par le feu ». Merci et bon après-midi !