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Balado, courriel, divulgâcher… Les québécismes au secours de la langue française !

Trouver le mot juste, varier son vocabulaire, s’amuser avec les expressions, éviter les anglicismes, c’est le dessein de tous les amoureux de la langue française. En la matière, la francophonie est une grande source d’inspiration pour nous, habitants de l’Hexagone. Les Québécois, par exemple, proposent des équivalents à bon nombre d’anglicismes, en particulier dans le domaine numérique. Voici comment et pourquoi les adopter !

Ne dites pas mail… dites « courriel »

Le nom courriel a été attesté au Québec dès 1990, soit dix ans avant que l’on commence, peu ou prou, à en envoyer ! En France, il a fallu attendre 2003 pour que la Commission d’enrichissement de la langue française valide cet équivalent. Mais il s’agit d’un revirement ! En effet, en 1997, la même Commission avait entériné « mél », depuis relégué au rang d’abréviation, de symbole, à faire figurer devant l’adresse électronique sur un document (comme on écrit « tél » pour « téléphone »). En effet, comme le précise Le Petit Robert, il faut se garder de l’employer comme substantif en disant « un mél ».

Courriel est ce qu’on appelle un mot-valise, procédé dont les Québécois sont friands. Courriel est la fusion de « courrier » et « électronique ». D’ailleurs, l’étape suivante pourrait être la création du verbe courrieler. « Je vous courrielle demain matin. » En attendant, envoyons-nous des courriels et sûrement pas des mails, d’autant que sans le « e » de electronic, le mail est un simple « courrier ».

Ne dites pas spam, dites « pourriel »

Tous les québécismes visant à remplacer les anglicismes n’ont pas fait florès en France. C’est le cas du malheureux pourriel, apparu en 1997 au Canada, entré dans Le Petit Larousse en 2004. Il était censé remplacer l’anglais spam qui lui aussi est un mot-valise formé sur spiced ham (jambon épicé). En effet, le spam est à l’origine une marque de jambon dont le nom était répété en boucle dans une pub, laquelle a été parodiée dans un célèbre sketch des Monty Python.

Seize ans plus tard, dans l’Hexagone, pourriel est à la peine. Est-ce parce que l’on perçoit le mot « pourri » et que ce n’est pas « joli » ? Pourtant, même s’il désigne des courriels inopportuns, potentiellement porteurs de virus, pourriel n’a rien de « pourri » : cet autre mot-valise est la fusion de poubelle et courriel. Quoi qu’il en soit, ça ne prend pas : ni pourriel, ni la déclinaison proposée par la Commission d’enrichissement, à savoir « arrosage » au lieu de spamming, le spammeur devenant un arroseur ou une arroseuse.

Des raisons d’espérer à présent : si spam continue à se maintenir, il semble concurrencé par l’expression « courriel indésirable » réduite à « indésirable ». Exemple : « Je n’ai pas reçu le courriel que tu m’as envoyé. – Regarde donc dans tes indésirables ! »

Ne dites pas chatter… dites « clavarder »

Autre québécisme de l’internet inventé en 1997, entré dans Le Petit Larousse en 2003 et Le Petit Robert en 2007 : clavarder. Encore un mot-valise, contraction de clavier et bavarder. Mais plutôt que de l’employer, les Français ont préféré modifier la graphie du verbe cha(t)ter pour le prononcer tcha(t)ter en ajoutant un « t » devant. Ici, il semble que c’est le terme même qui soit passé de mode, en même temps que les fameux tchats comme MSN ou Caramail. Utilisant désormais des « applis », nous revenons à des termes classiques comme « parler », « discuter », « échanger ». Si, il y a vingt ans, le dialogue virtuel méritait son verbe, il s’est depuis banalisé, d’où ce retour aux sources sémantique.

Ne dites pas spoiler… dites « divulgâcher »

Autre mot-valise particulièrement ingénieux, et qui nous vient aussi de la Belle Province : le verbe divulgâcher, en lieu et place de l’anglais spoiler. Précisons que spoiler n’est qu’une déformation du français spolier, passé par l’anglais et qui nous est revenu, comme tant d’autres mots anglais. Comment expliquer que divulgâcher connaisse une certaine vitalité, en comparaison d’autres québécismes qui peinent à s’imposer ? Plusieurs motifs semblent l’expliquer : un mot bien formé (divulguer + gâcher), intelligible, d’emploi plaisant, et porté par une communauté en plein apogée : celle des sériphiles.

Ne dites pas podcast… dites « balado »

Autre communauté en plein apogée, celle des auditeurs de podcasts ou de balados, si l’on veut éviter l’anglicisme. Le nom balado, né en 2005 au Québec, est entré dans Le Petit Larousse en 2008 et dans Le Petit Robert l’année suivante. C’est l’apocope de baladodiffusion, mot qui équivaut également à l’anglais podcasting. Après le baladeur, qui avait remplacé le walkman, place au balado !

Et pour hashtag, alors ?

Le succès du réseau social Twitter, et par la suite d’Instagram, a vu renaître le symbole « # ». Nous le connaissons bien, et pour cause, il était déjà présent sur les claviers de nos vieux téléphones fixes ! Accolé à un mot, il permet de transformer ce mot en thème de discussion et favorise sa recherche et son référencement. Voilà pourquoi les Québécois l’ont baptisé mot-clic puisque l’on peut effectivement cliquer sur ce mot pour « creuser le sujet ». Cette fois-ci, les Français ont essayé de proposer leur propre traduction : mot-dièse.

Malheureusement, ni mot-clic, ni mot-dièse, ni même mot-croisillon (en effet, les puristes indiquent que le symbole « # » se nomme « croisillon »). Ils n’ont pas réussi à freiner la propagation de l’anglais hashtag, promu jusque dans les médias français. Cela étant, il n’en tient qu’à vous de vous démarquer en employant l’équivalent français que vous souhaitez !

En matière de francisation, comme de féminisation d’ailleurs, c’est l’emploi de formes nouvelles et régulières dans nos communications quotidiennes qui permettra, par mimétisme, leur circulation et leur adoption à plus grande échelle.

Sandrine Campese

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Bonjour,
Cet article est très intéressant, et je trouve dramatique le fait que quasiment personne en France ne fasse l’effort de trouver d’équivalent à ces mots anglais qui arrivent en masse. Je viens justement de lire dans un quotidien national « le ‘clapping’ de 20 heures » destiné aux personnels soignants. Bien sûr, le mot « applaudissements » n’existe pas dans notre langue… Finalement, tout cela n’est pas très étonnant dans un pays qu’on qualifie de « start-up nation », dans lequel on dévoile des « …gate » par ici, des « …leak » par là, ou encore où on fait du « bashing », ou un ministre peut parler de « bullshit »… Quel dommage !