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Faire chou blanc, raconter par le menu… 5 expressions qui ne sont plus comprises

Les 5 expressions suivantes ont un point commun : de nos jours, on n’en maîtrise plus vraiment le sens. Prononciation différente, évolution sémantique, homophonie… les raisons qui l’expliquent sont diverses. Si, à l’oral, la confusion peut passer inaperçue, elle peut être problématique à l’écrit, quand l’orthographe entre en jeu. Quoi qu’il en soit, il est toujours bon de redonner à nos chères expressions, souvent très anciennes, toute leur vitalité.

Faire chou blanc

Rien à voir avec la plante potagère dont on consomme les feuilles, quand bien même il existerait une variété de chou… blanc ! Le chou(p) serait ici le coup, prononcé « à la berrichonne » puisque c’est dans le Berry que serait née l’expression. Est-ce parce que le nom chou vient du latin caulis que le son [k] s’est maintenu de manière dialectale ? Ainsi, au jeu de quilles, un c[h]oup blanc était un coup nul, sans résultat. « Faire chou blanc » signifie donc ne pas réussir, é-chou-er !

Il n’en demeure pas moins que le nom chou entre dans de nombreuses expressions populaires. Au singulier, il désigne familièrement la tête : « ne rien avoir dans le chou » (être stupide), « prendre le chou » (excéder, énerver). Au pluriel, il garde peu ou prou son sens premier « faire ses choux gras de quelque chose », en tirer profit, « aller planter ses choux » (se retirer à la campagne), « être dans les choux » (dans une situation délicate), « ménager la chèvre et le chou » (satisfaire deux personnes aux intérêts opposés).

Offrir le gîte et le couvert

Intéressons-nous d’abord au « couvert ». Littéralement, le couvert désigne « ce qui couvre », à commencer par ce qui couvre la maison. Par le passé, on « réparait le couvert », c’est-à-dire le toit d’une habitation. On a même fini par nommer « couvert » un logement où l’on est protégé des intempéries. Quand au XVIIe siècle La Fontaine écrit, dans sa fable Le Rat qui s’est retiré du monde, « Le vivre et le couvert : que faut-il davantage ? », le mot est bien à prendre en ce sens.

Mais le nom couvert a également fini par désigner ce qui couvrait non plus seulement une maison, mais une table ! Autrement dit : nappe, assiettes, verres, serviettes, fourchettes, cuillères, couteaux… Quand La Fontaine, dans une autre fable murine (Le Rat de ville et le Rat des champs), écrit « Sur un tapis de Turquie le couvert se trouva mis », il est bien question de ce qui sert à faire bonne chère* !

Passons au gîte, à présent. Le nom n’est pas présent dans la version initiale. On l’a bien vu chez La Fontaine, qui parle du « vivre et du couvert ». Par le passé, le vivre désignait la nourriture ; sens qui survit encore aujourd’hui dans le pluriel les vivres.

Notons que le nom viande a la même origine, le verbe latin vivere, « vivre ». Avant de désigner la chair des animaux, la « viande » était la nourriture au sens large.

Autrement dit, « le vivre et le couvert » a fini par désigner deux fois la nourriture ! Voilà pourquoi l’on a transformé vivre en gîte pour indiquer qu’il s’agissait bien du toit, puisque, rappelons-le, couvert n’était plus compris en ce sens. Et pourquoi gîte ? Parce qu’il conserve le son « i » de vivre (on sait à quel point la sonorité compte s’agissant des expressions populaires).

En conclusion, selon le sens que l’on donne à couvert, on obtient non pas une, mais deux expressions redondantes : « le vivre et le couvert », avec deux fois l’idée de « nourriture », ou « le gîte et le couvert », avec deux fois l’idée de « toit ». Mais alors, que dire ? Pourquoi ne pas conserver tout bonnement l’expression initiale, « le vivre et le couvert », avec couvert dans son sens premier ?

Raconter par le menu

Si nous avons jusqu’alors parlé principalement de nourriture, l’inventaire s’arrête ici. En effet, le menu n’est pas, dans cette expression, la liste détaillée des mets dont se compose un repas, ni la carte sur laquelle sont inscrits les entrées, plats, fromages, desserts et boissons ainsi que les prix correspondants.
Ici, le menu, c’est le menu détail, c’est-à-dire le plus petit détail. « Raconter une histoire par le menu », c’est le faire sans omettre aucun détail, le plus précisément possible, quitte à ennuyer son auditoire, d’ailleurs !

La locution adverbiale « par le menu » équivaut à « en détail », où détail reste au singulier.

Être en butte à

Dans cette expression, il n’est pas question du but, nom masculin désignant un objectif, ou, pour les plus sportifs de nos lecteurs, du point marqué quand le ballon franchit la ligne (de but). Il est question de LA butte, nom féminin qui s’écrit avec -tte à la fin !
La butte, c’est le monticule où l’on place les cibles lors des exercices de tir. On parle d’ailleurs de « butte de tir ». « Être en butte à » signifie « être exposé(e) à », « être le sujet de » comme si l’on servait de cible. On peut être en butte à la tentation, aux moqueries, aux critiques, aux insultes…

C’est la même butte, « petite éminence de terre », qui compose les toponymes (noms de lieux) parisiens « parc des Buttes-Chaumont » et « butte Montmartre ». C’est à Montmartre que se trouve la place du Tertre, le tertre étant un autre mot pour dire « butte » ou « monticule » !

Si l’on est tenté d’écrire but, c’est certainement parce que l’on pense à une autre expression, « de but en blanc », qui signifie « directement, brusquement ».

Être frais et dispos

Dans l’expression frais et dispos, il faut reconnaître l’adjectif dispos. Oui, avec un « s » final ! Cet adjectif, noté « rare » dans Le Petit Robert, signifie « qui est en bonne disposition pour agir ». Il vient de l’italien disposto. L’un de ses synonymes, ingambe, vient aussi de l’italien (in gamba, « en jambes ») et fait également l’objet d’un contresens.

Demandez à quelqu’un autour de vous d’épeler l’expression. Il y a de grandes chances qu’il indique « d-i-s-p-o ». Et pour cause, il pensera à dispo, abréviation (et plus précisément apocope, puisqu’on a retranché la fin du mot) de l’adjectif disponible.

« Frais et disponible », cela pourra fonctionner aussi, n’est-ce pas ? Sauf que dans cette expression, il n’est pas question de disponibilité, mais bien de disposition. Nuance ! On peut être dispos, c’est-à-dire disposé à agir, sans pour autant prendre le temps de le faire, d’interrompre ses activités sur-le-champ !

Pour retenir la bonne orthographe de cette expression, mettons-la au féminin, ce qui donne « fraîche et dispose » !

Sandrine Campese
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Faire chou blanc : je pense plutôt au Blanc de la cible (cf. de but en blanc) qu’on rate en « échouant » => « Faire l’échoue-blanc », compris les choux blancs (?), puis chou blanc au singulier

    Bonsoir jacMarcq87, nous n’avons pas trouvé d’autres étymologies pour cette expression, mais si vous avez une source justifiant celles que vous proposez, nous sommes preneurs ! Bonne soirée.