Figure de style La question rhétorique : une fausse interrogation La question rhétorique est une fausse interrogation : on suppose que l’interlocuteur ou l’auditoire connaît déjà la réponse. En réalité, la question est même très souvent formulée de manière à induire la réponse. La question rhétorique est donc une figure de style qui vise à convaincre. L’objectif est de faire comprendre que la réponse suggérée est la bonne… et la seule. Par exemple, à la question « Croyez-vous que je puisse emprunter davantage dans ma situation ? », on devine que la réponse ne peut être que négative. La question rhétorique est aussi appelée « interrogation oratoire ». Évaluer mon niveau Pour progresser en français, faites le test ! Lancer l’évaluation On vous explique Notons que la rhétorique désigne l’art de bien parler, ou l’action du discours sur les esprits. En grec et en latin, il s’agissait de l’art oratoire. Exemples de questions rhétoriques littéraires : « Si vous nous piquez, ne saignons-nous pas ? Si vous nous chatouillez, ne rions-nous pas ? Si vous nous empoisonnez, ne mourrons-nous pas ? Et si vous nous faites du tort, ne nous vengerons-nous pas ? » (William Shakespeare, Le Marchand de Venise) Dans cette réplique restée célèbre, Shylock pose sous la plume de Shakespeare un grand nombre de questions rhétoriques visant à justifier son désir de vengeance. « Tu veux qu’on se lie à demeurer au premier objet qui nous prend, qu’on renonce au monde pour lui, et qu’on n’ait plus d’yeux pour personne ? » (Molière, Dom Juan) À travers cette interrogation oratoire, Dom Juan tente de justifier sa conduite auprès de son valet Sganarelle. Exemples de questions rhétoriques courantes : Sans même que nous nous en rendions compte, nous utilisons l’interrogation oratoire ou la question rhétorique de manière quotidienne. Nous induisons dans ce cas la réponse souhaitée. Par exemple : N’est-ce pas une belle journée ? Est-ce qu’il n’est pas temps d’aller se coucher ? N’auriez-vous pas fait la même chose à ma place ? Dans les trois cas, l’interlocuteur devra logiquement répondre « si ». On atteste ainsi que la journée est belle, qu’il est temps d’aller se coucher, et qu’il ou elle aurait fait la même chose. Notons que les questions rhétoriques peuvent induire aussi des réponses ouvertes. Par exemple : Qui peut résister à la tentation ? Que sommes-nous devenus ? Dans le premier cas, il semble entendu que personne ne peut résister à la tentation. Dans le second, on attend une réponse pessimiste, confirmant une forme de décrépitude. Enfin, précisons que la question rhétorique ne sert pas seulement à convaincre. Au quotidien, elle permet aussi de faire part de son humeur, par exemple, lorsqu’on demande, agacé : « Tu crois que je n’y ai pas pensé ? » Fonctions de la question rhétorique : Souligner une évidence La question rhétorique n’attend pas de réponse, car celle-ci est évidente. Elle met l’accent sur une vérité difficile à contester. Créer un effet d’emphase La question rhétorique renforce un propos en attirant l’attention et en insistant sur une idée clé. Par exemple : « Qui pourrait nier l’importance de l’éducation ? » Provoquer une réflexion La question rhétorique peut aussi avoir pour fonction de pousser le destinataire à réfléchir et à remettre en question ses idées ou ses certitudes. Exemple : « Sommes-nous vraiment prêts à affronter les conséquences de nos actes ? » Exprimer une critique La question peut suggérer un reproche ou une remarque ironique sans l’exprimer directement. Par exemple : « Vous pensez vraiment que c’était une bonne idée ? » Donner du rythme et du relief au discours Enfin, la question rhétorique permet de varier la structure des phrases et rend le texte ou l’intervention plus dynamique. Exemple : « Pourquoi hésiter ? Pourquoi attendre ? Pourquoi ne pas agir maintenant ? » Avis de l'expert La question rhétorique est une figure de style qui permet d’engager l’interlocuteur ou l’auditoire pour mieux les persuader ou leur faire énoncer ce que l’on souhaite. Exercice Exerçons-nous ! Ci-dessous, s’agit-il de questions rhétoriques ? As-tu pris tes affaires pour l’école ? N’as-tu pas pensé que cela le mettrait en colère ? N’est-ce pas de cela que tu m’as parlé hier ? Combien de morts faudra-t-il pour que cesse cette guerre absurde ? Réponses Non, ce n’est pas une question rhétorique, mais une véritable interrogation. Il s’agit bien d’une question rhétorique : il semble évident que la réaction n’a pas été anticipée. Ce n’est pas une question rhétorique : d’une part, la personne conserve un doute, et d’autre part, elle ne tente pas de convaincre son interlocuteur. C’est bien une question rhétorique : on n’attend bien sûr pas que l’auditoire donne un nombre, mais qu’il prenne conscience de l’absurdité de la guerre évoquée.