Ohé, du bateau ! Mode d’emploi des interjections en « h »

Ah ou ha ? Eh ou  ? Oh ou ho ? En ancien français, c’était plus simple : ces interjections s’écrivaient « a », « e » et « ô » ! Aujourd’hui, on ne sait pas toujours quelle forme employer. Popularisées par les grands auteurs du théâtre classique comme Molière, Racine ou Corneille, elles ont chacune leur subtilité et ne sauraient être confondues. Pour ne plus se tromper, il suffit de suivre le mode d’emploi !

Commençons par la première lettre de l’alphabet : l’interjection « ah » marque toujours un sentiment vif, qu’il s’agisse de plaisir, de douleur, d’admiration ou d’impatience. Exemple : « Ah ! fâcheuses nouvelles pour un cœur amoureux ! » (Molière, Les Fourberies de Scapin).

Il ne faut pas la confondre avec « ha » qui exprime la surprise et surtout le rire, quand elle est redoublée. Exemple : « Ha, ha, ha. Ma foi ! cela est tout à fait drôle » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme).

Fréquemment prise pour la conjonction de coordination « et », l’interjection « eh » permet d’attirer l’attention ou de renforcer le mot qu’elle précède. Redoublée en « Eh ! eh ! », elle indique un sous-entendu. « Eh » est souvent accompagnée de l’adverbe « bien » : « eh bien » marque l’émotion du locuteur ou introduit une digression, une information, par rapport à un contexte donné. Exemple : « Eh bien ! régnez, cruel, contentez votre gloire » (Racine, Bérénice).

« Eh » se distingue de « hé » qui sert à appeler ou à interpeller quelqu’un. Répétée, elle exprime l’adhésion ou l’approbation. À noter que « hélas » est formée de « hé » et de l’ancien français las (malheureux).

L’interjection « oh » marque l’étonnement ou donne de l’énergie à une phrase. Exemple : « Oh ! oui, je sais lire et écrire » (Molière, Le Bourgeois gentilhomme). On la retrouve sous la forme combinée « oh là là » ou redoublée « oh oh ». On notera l’emploi de « oh » ou « ohé » pour interpeller et attirer l’attention, notamment en navigation et au bal masqué, ohé, ohé.

De son côté, « ho » a d’abord signifié « halte ! ». Ce sens de « arrêter, modérer » est aujourd’hui vieilli, bien qu’encore utilisé par les dresseurs pour calmer les animaux (notamment les chevaux), et sous la forme « holà », surtout dans l’expression « mettre le holà », c’est-à-dire faire cesser une querelle ou quelque chose de déplaisant.

Voilà pour la théorie. Dans la pratique, les interjections qui commencent par un « h » sont vieillies et tendent à disparaître. Ainsi, « ah » a pour ainsi dire remplacé « ha ». De la même manière, « ho » n’est plus guère utilisé, si ce n’est par les sept nains qui rentrent du boulot, hé ho, hé ho.

Un dernier mot sur la ponctuation : une interjection peut être suivie d’un point d’exclamation pour encore plus d’emphase ou d’une virgule pour se fondre dans la phrase. Signalons enfin que la majuscule disparaît après le point d’exclamation lorsque l’interjection fait partie intégrante du propos.

Sandrine Campese

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