Antithèse, oxymore, paradoxe : 3 figures d’opposition

La langue française offre d’infinies possibilités d’exprimer la même idée. Les figures de style sont là pour nous y aider. Aujourd’hui, intéressons-nous à trois procédés fondés sur l’opposition de mots contraires. Leur but ? Attirer l’attention, susciter la surprise, faire réfléchir, marquer durablement notre esprit. Voici le « mode d’emploi » de l’antithèse, de l’oxymore et du paradoxe.

1) L’antithèse

L’antithèse consiste à rapprocher, au sein du même énoncé, deux pensées, deux expressions, afin de créer un contraste fort. Par exemple, dans Ruy Blas (1838), Victor Hugo évoque « un ver de terre amoureux d’une étoile ».

Généralement, l’antithèse met en parallèle deux antonymes : « Selon que vous serez puissant ou misérable, les jugements de cour vous rendront blanc ou noir » (La Fontaine), « À vaincre sans péril, on triomphe sans gloire » (Corneille).

De nombreux titres d’œuvres reposent sur l’antithèse. Les antonymes sont bien souvent coordonnés, ce qui donne un effet de symétrie : Le Rouge et le Noir (Stendhal), L’Être et le Néant (Sartre), Guerre et Paix (Tolstoï), La Belle et la Bête, Quatre mariages et un enterrement, Des hommes et des dieux

2) L’oxymore

L’oxymore, aussi appelé « oxymoron », réunit des mots de sens opposé, souvent un nom et un adjectif.

La littérature classique nous a fourni les plus beaux. Le Cid de Corneille, qui contient déjà une célèbre litote (« Va, je ne te hais point ! »), propose l’oxymore suivant : « Cette obscure clarté qui tombe des étoiles ». Dans un de ses poèmes, Victor Hugo compare les hommes à des « nains géants ». Balzac, quant à lui, qualifie de « sublime horreur » la blessure au crâne du colonel Chabert.

La publicité s’est également saisie du procédé. Déjà, dans les années 1980, le parfum masculin Drakkar Noir promettait une « douce violence » tandis que François Mitterrand étalait sa « force tranquille » sur ses affiches de campagne.

N.B. Pour former un oxymore, les mots de sens contraire sont toujours accolés, tandis que l’antithèse ne fait que les unir au sein d’une même proposition.

3) Le paradoxe

Un paradoxe, du grec para, « contre », et doxa, « opinion », est une idée qui va à l’encontre de l’opinion commune. Cette figure de style repose sur le rapprochement de mots opposés (antithèse) au sein d’une expression dépourvue de sens logique… Du moins en apparence !

Ainsi, Jacques Prévert a écrit : « Paris est tout petit, c’est là sa vraie grandeur. » Poussé à son paroxysme, le paradoxe tutoie l’absurde.

Pas étonnant qu’il soit employé dans le cinéma et la publicité ! Ainsi, « Vivement aujourd’hui » est le slogan d’une grande enseigne de distribution. Une invitation à profiter du moment présent ? Autre paradoxe publicitaire, l’accroche de ce site dédié aux relations extraconjugales, qui a fait couler beaucoup d’encre : « Et si cette année vous trompiez votre amant avec votre mari ? »

N.B. Le paradoxe va encore plus loin que l’oxymore et l’antithèse. D’apparence absurde, il invite à réfléchir ou révèle une vérité.

Sandrine Campese

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    Bonjour Ellimac1er, on écrit « je lui dis » (et non « je lui dit »), il manque également le « ne » de la tournure restrictive « ne… que » (Je ne lui dis que…). Enfin, je ne comprends bien le sens de « dire son reflet ». Bon après-midi.

Des doutes me restent. En effet, des expressions telles : assez génial ou assez fantastique … Sont contradictoires mais comment identifier ce qui me semble paradoxale. Merci pour ce que vous faites.

    Bonjour Sabine, normalement, l’adverbe assez signifie « suffisamment » ou « moyennement ». L’emploi actuel, qui vise au contraire à renforcer le sens de l’adjectif qui suit, semble ressusciter le sens (vieilli) de « trop ». Exemples : Me suis-je fait assez attraper ! Est-il assez bête ! (Source : Le Petit Robert de la langue française). Bon week-end.

    Bonjour Armel, le Projet Voltaire est un service de remise à niveau en orthographe. Nous ne fournissons pas les « épreuves de littérature de première ». Néanmoins, vous pouvez vous entraîner à l’orthographe en vous inscrivant sur notre site : http://www.projet-voltaire.fr. Bonne découverte !

Bonjour Sandrine,

A votre avis, la formule « Plan de sauvegarde de l’emploi », désignant un plan de licenciement prétendument destiné à sauver l’emploi de ceux qui resteront, est-elle un oxymore, un paradoxe ou un euphémisme. Je n’arrive pas à me décider.

    Bonjour Saïd, l’antiphrase ne figure pas dans ce billet car contrairement à l’antithèse, l’oxymore et le paradoxe, elle ne met pas deux mots ou deux expressions en opposition. Elle est fondée sur l’emploi d’un mot dans un sens contraire à sa véritable signification. Elle s’apparente davantage aux figures de style utilisant l’ironie (perceptible dans l’intonation), telles que la litote. Bonne journée.

Pour la beauté de l’exercice, ajoutons la figure rhétorique du chiasme : inversion de membres de la phrase permettant de mettre en valeur une opposition : « Il faut manger pour vivre et non pas vivre pour manger. »