« Ceci dit », « je m’en rappelle », « assis-toi »… 5 erreurs de français que l’on commet à son insu !

Le point commun entre les cinq erreurs suivantes ? Elles sont commises par des personnes ayant plutôt un bon niveau en langue française. Par conséquent, elles passent souvent inaperçues, entrent dans « l’usage » à force d’être entendues (et jamais corrigées !). Pourtant, ces subtilités ont du sens, dès lors que l’on s’y intéresse. Voici quelques explications, non dénuées de logique, qui vous inciteront certainement à adopter le mot juste !

Erreur no 1 : ceci dit au lieu de cela dit 

Cette expression, sous sa forme erronée, est sur toutes les lèvres. Elle n’écorche plus que les oreilles des puristes, soucieux du sens des mots. Car employer ceci à la place de cela, c’est méconnaître la signification de chacun de ces pronoms démonstratifs. Stricto sensu, ceci annonce ce qui va suivre (un sujet que l’on s’apprête à évoquer) ; cela renvoie à ce qui précède (un sujet dont on vient de parler). Par conséquent, il n’est pas logique de dire et d’écrire ceci dit puisque ceci fait référence au futur et le participe passé dit au passé ! Cette contradiction est encore plus manifeste sous la forme ceci étant ditceci ayant été dit

Cela dit, ceci dit a pénétré l’usage, et même nos dictionnaires. Étonnamment, Le Petit Robert, tout en précisant que ceci est opposé à cela, signale cette forme dans ses exemples. Quant au Petit Larousse, il prévient : « Éviter ceci dit qui, en dépit de sa fréquence dans l’expression orale relâchée, reste déconseillé. »

Même distinction avec voici et voilà. Exemples : « Voici la question : être ou ne pas être ? » / « Être ou ne pas être ? : voilà la question. »

Erreur no 2 : je vous serais gré au lieu de je vous saurais gré (ou je vous serais reconnaissant)

Je vous saurais gré de ne plus faire cette erreur ! Dans cette expression, au moins deux difficultés : d’une part, c’est le verbe savoir qui entre en scène, et non être. Si l’on change de mode et de temps, cela donne : je vous sais gré ! C’est bien savoir.

D’autre part, le verbe est au conditionnel, puisque l’on émet un souhait. Il ne faut donc pas oublier le « s » final, terminaison du conditionnel à la première personne du singulier : je saurais (que l’on devrait prononcer [saurè]). Oublier le « s » reviendrait à conjuguer le verbe au futur : je saurai (que l’on devrait prononcer [sauré]). Si l’on change de personne, le conditionnel est plus manifeste : nous vous saurions gré.

Attention enfin à la construction : on sait gré à quelqu’un de quelque chose. Exemple : « Je saurais gré à la dernière personne qui quitte les locaux d’éteindre toutes les lumières ! »

Si vous tenez vraiment à employer le verbe être (et toujours au conditionnel !), ce sera avec l’adjectif reconnaissant. D’ailleurs, c’est bien le sens de l’expression « savoir gré » (avoir de la reconnaissance). Exemple : « Je vous serais reconnaissant(e) de bien vouloir m’adresser… »

Pour s’entraîner : https://www.projet-voltaire.fr/regles-orthographe/je-vous-saurais-gre-ou-je-vous-serais-gre/

Erreur no 3 : je m’en rappelle au lieu de je me le rappelle (ou je m’en souviens)

Ici aussi, un soupçon d’analyse grammaticale permet d’écarter toute confusion. Le verbe pronominal « se rappeler » est transitif direct, autrement dit, il se construit avec un complément d’objet direct (COD). Ainsi, on se rappelle quelque chose ou quelqu’un. Je me rappelle quelque chose, je me le rappelle. De même, à la forme négative : Je ne me rappelle pas quelque chose, je ne me le rappelle pas.

Si vous tenez vraiment à employer le pronom « en », qui remplace généralement un complément d’objet indirect (COI), il faudra changer de verbe et utiliser « se souvenir », qui est transitif indirect. On se souvient de quelque chose ou de quelqu’un, on s’en souvient.

Vous rappellerez-vous cette règle ? Vous la rappellerez-vous ?

Erreur no 4 : loin s’en faut au lieu de tant s’en faut (ou loin de là)

Voici ce qu’il est convenu d’appeler un « télescopage » d’expressions ! Il existe en effet deux expressions pour signifier « au contraire », même « bien au contraire » : tant s’en faut et loin de là. Par conséquent, employer « loin s’en faut », c’est emprunter à l’une et à l’autre pour créer une nouvelle expression qui ne veut pas dire grand-chose. Néanmoins, cette dernière se répand dans l’usage et si elle demeure absente des dictionnaires de référence, elle a son entrée dans le dictionnaire L’Internaute et le Wiktionnaire.

L’Académie française, qui s’oppose à cette invention, précise d’ailleurs la légère nuance existant entre tant s’en faut et loin de là. « Pour repousser une allégation, indique-t-elle sur son site, on s’écriera Loin de là ! Loin de moi une telle idée ! Pour souligner un écart, une différence en nombre, en quantité, on utilisera Tant s’en faut, Il s’en faut (sous-entendu de beaucoup). Nous ne sommes pas assez nombreux, tant s’en faut. Je n’ai pas réuni cette somme, il s’en faut. »

Erreur no 5 : assis-toi au lieu de assois-toi (ou assieds-toi)

Le verbe asseoir (que l’on peut également écrire assoir depuis les rectifications orthographiques de 1990) a la particularité de se conjuguer de deux façons. À la première personne du présent de l’indicatif, par exemple, on peut dire et écrire : je m’assois (1re forme) ou je m’assieds (2e forme).

C’est à la deuxième personne du singulier de l’impératif que les choses se compliquent encore davantage, puisque l’on voit apparaître une troisième forme, erronée, celle-ci : « assis-toi ». Or, il n’existe que deux formes possibles : assois-toi et assieds-toi, les mêmes qu’à l’indicatif présent : tu t’assois / tu t’assieds.

Et aux autres personnes ? Asseyons-nous et asseyez-vous (2e forme) semblent l’emporter sur assoyons-nous et assoyez-vous (1re forme), qui sont tout aussi corrects !

Une règle sur laquelle, désormais, vous ne vous assoirez (ou assiérez) plus !

Sandrine Campese

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Je découvre votre site avec grands plaisir et intérêt!
J’avais fait part il y a quelques années à l’académie française, à plusieurs radios et à mon inspection académique, de ce qui m’ « écorche » les oreilles, à savoir la lettre S prononcée [z] comme dans les mots tourisme (prononcé [turizm] , Israël prononcé « Izraël » et tant d’autres! Je n’ai jamais eu de réponses, mais il me semble l’entendre un peu moins souvent sur les chaînes de radio.
Il y a aussi cette mode de prononcer [o] à la place du « o ouvert », et vice versa, l’accent régional n’étant pas toujours la cause de ce défaut.
Merci de m’éclairer sur ces sujets.

    Bonjour, merci de votre intérêt et de votre enthousiasme ! Étonnant que l’Académie française ne vous ait pas répondu, elle est assez réactive d’habitude. Aviez-vous bien rempli le formulaire ci-après : http://www.academie-francaise.fr/la-langue-francaise-dire-ne-pas-dire/dire-ne-pas-dire ? En tout cas, nous vous confirmons qu’il faut bien dire « tourisme » et « Israël » en faisant entendre [s] et non [z]. C’est la prononciation qui figure dans le dictionnaire. Concernant le « o », je l’ai moins remarqué. Par ailleurs, [é] et [è] tendent de plus en plus à se confondre, le premier éclipsant petit à petit le second, privant, à l’oral, d’une distinction entre futur et conditionnel, notamment. Bonne journée.

Bonjour,
vous dites que  » en », qui remplace toujours un complément d’objet indirect (COI) », mais « en » peut aussi remplacer un COD ou même un CCL.
Salutations.

Bonjour,
Je pense qu’il a une erreur au paragraphe 2 de l’erreur 2. Vous dites de ne pas oublier le « s » au conditionnel pour le verbe être (je serais) au lieu du verbe savoir (je saurais)