Top 10 des surnoms inventés par Voltaire

Tout a été dit sur VoltVoltaireaire : le philosophe des Lumières, le voyageur de l’Europe, l’apôtre de la tolérance… Mais ce qu’on ignore, c’est qu’il donnait des petits noms à tout le monde : ses amis comme ses adversaires ! Qu’ils soient affectueux, familiers ou piquants, voici quelques-uns de ces surnoms qui prouvent que le grand homme ne manquait pas d’imagination.

  1. Luc

Ce sobriquet est destiné à Frédéric II, roi de Prusse. La raison en est limpide : « luc » à l’envers donne « cul ». Élégant ! Et comme Voltaire n’avait pas le « culot » de le lui dire en face, il s’en gaussait dans les lettres adressées à ses amis.
  1. Mords-les

C’est ainsi que Voltaire appelle André Morellet, homme d’Église et académicien ayant contribué à l’Encyclopédie. Son esprit « mordant » envers les adversaires des philosophes lui valut deux mois d’emprisonnement à la Bastille.
  1. Belle et bonne

Surnom attribué à Mlle de Varicourt que Voltaire considérait comme sa fille adoptive. Il l’a accueillie chez lui et introduite dans le monde littéraire. Ne voyez pas le mal partout : au XVIIIe siècle « bonne » ne signifiait pas « sexuellement attirante » mais « pleine de bonté ».
  1. Ma Catau

La femme que Voltaire nomme aussi familièrement n’est autre que Catherine de Russie ! Or, « catau » est une variante de « catin ». Embarrassant, non ? D’autant plus que l’Impératrice, qui avait 21 favoris, était connue pour collectionner les amants…
  1. Les bœufs-tigres

Rien à voir avec les « bœufs-carottes », les enquêteurs de la Police nationale connus pour « cuisiner » les suspects. Ce sont les juges que Voltaire appelle « bœufs-tigres » car ils sont « bêtes comme des bœufs et méchants comme des tigres ».
  1. Frère Tonpla

Yo, Diderot a.k.a. « Frère Tonpla » est dans la place ! Il faut y lire « Platon » à l’envers. Voltaire précurseur du verlan ? Plus sérieusement, il surnommait aussi le grand encyclopédiste « Pantophile », c’est-à-dire « l’ami de toutes choses ».
  1. Mme Pompon-Newton

C’est ainsi que Voltaire nomme celle qui fera battre son cœur pendant 15 ans : Émilie du Châtelet. Pompon, c’est un clin d’œil à la Pompadour, marquise comme Émilie. Quant à Newton, il était le principal objet d’étude de cette brillante mathématicienne.
  1. Les Iroquois

Habitants de Colmar, voilà comment Voltaire vous désignait ! Pour lui, votre ville n’était « ville ni française ni allemande, mais tout à fait iroquoise », c’est-à-dire « bizarre ». Tout ça parce qu’il se fit chahuter par quelques jésuites durant son séjour entre 1753 et 1754.
  1. Florianet

C’est le diminutif que Voltaire donna affectueusement au poète et fabuliste Jean-Pierre Claris de Florian. Son nom ne vous dit rien ? Et pourtant ! Il est l’auteur de nombreuses expressions populaires comme « Pour vivre heureux, vivons cachés » et « Rira bien qui rira le dernier » !
  1. Le malingre

Ce dernier surnom, qui qualifie quelqu’un de santé fragile, a été attribué par Voltaire à… lui-même ! Dès sa jeunesse, il a toujours cru qu’il était gravement malade et que la fin était proche. Il signait même ses lettres avec ce surnom, sans doute dans le but d’apitoyer ses correspondants. Résultat : il les a tous enterrés en mourant à l’âge de 83 ans !

Sandrine Campese

Illustration : Portrait d’Émilie du Châtelet par Maurice-Quentin de La Tour

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Bonjour Sandrine,

Tout a été dit sur Voltaire, certes, mais certaine choses ne se disent plus :

• Il avait un style acéré et de la fantaisie, était connu pour ses bons mots, mais excellait surtout dans la méchanceté : à un auteur qui lui avait envoyé son livre, il répond « j’ai lu votre ouvrage d’un derrière distrait ».

• Cette méchanceté confinant à la misanthropie s’est exprimée dans de nombreux domaines : misogynie (voir l’article Femme du Dictionnaire philosophique) ; homophobie (article Amour socratique du Dictionnaire) ; racisme « Leurs yeux ronds, leur nez épaté, leurs lèvres toujours grosses, leurs oreilles différemment figurées, la laine de leur tête, la mesure même de leur intelligence, mettent entre eux et les autres espèces d’hommes des différences prodigieuses. Et ce qui démontre qu’ils ne doivent point cette différence à leur climat, c’est que les nègres et les négresses, transplantés dans des pays les plus froids, y produisent toujours des animaux de leur espèce…  » (Essai sur les mœurs et l’esprit des nations), Voltaire doit d’ailleurs sa fortune à la spéculation mais aussi au commerce des esclaves ; islamophobe (Le fanatisme ou Mahomet) ; judéophobie « C’est à regret que je parle des juifs : cette nation est, à bien des égards, la plus détestable qui ait jamais souillé la terre. » (article Tolérance du Dictionnaire) ; francophobie « Ce peuple sot et volage, aussi vaillant dans le pillage, que lâche dans les combats. » ; haine du peuple « Il n’est pas à propos que le peuple soit instruit, il n’est pas digne de l’être. » « Le peuple ressemble à des bœufs auxquels il faut un aiguillon, un joug et du foin ».

• Les seuls qui trouvaient grâce à ses yeux étaient les puissants devant lesquels il se prosternait : L’impératrice Catherine de Russie « Daignez observer que je ne suis pas Français, je suis Suisse, et si j’étais plus jeune, je me ferais russe » ; le roi de Prusse, Frédéric, « Vous êtes fait pour être mon roi… délices du genre humain. Je rêve à vous, prince, comme on rêve à sa maîtresse ! Mon adorable maître. Votre Majesté qui s’est fait homme ! »

    Bonjour Jacques, je connais les traits du personnage que vous détaillez ici, et je crois que de nombreux lecteurs les connaissent aussi. Loin de nous l’idée selon laquelle Voltaire était un homme parfait ! Il y aurait beaucoup à dire sur d’autres « modèles » qui forcent l’admiration de tous. Ce qui nous intéresse ici, c’est sa contribution au rayonnement du français et ses jeux de « lettres » savoureux. Cela, au moins, nul ne peut le lui enlever ;-). Bonne journée.

      C’est vrai, Sandrine, que si l’on s’en tient au maniement du français, Voltaire était un virtuose.
      « Je me souviens que mes rivaux et moi, quand j’étais à Paris, nous étions tous fort peu de chose, de pauvres écoliers du siècle de Louis XIV, les uns en vers, les autres en prose, quelques-uns moitié prose, moitié vers, du nombre desquels j’avais l’honneur d’être ; infatigables auteurs de pièces médiocres, grands compositeurs de riens, pesant gravement des œufs de mouche dans des balances de toile d’araignée. » (Lettre à l’abbé Trublet, 27 avril 1761)

      « J’ai reçu, Monsieur, votre nouveau livre contre le genre humain (…). On n’a jamais employé tant d’esprit à vouloir nous rendre bêtes. Il prend envie de marcher à quatre pattes quand on lit votre ouvrage. Cependant, comme il y a plus de soixante ans que j’en ai perdu l’habitude, je sens malheureusement qu’il m’est impossible de la reprendre.» (Lettre à Rousseau, 30 aôut 1755).

      « Non, il n’est rien que Nanine n’honore » (Nanine, III, 8).

      Voltaire était un homme du XVIIIe, siècle des Lumières mais aussi de l’Esprit (comme le montre le film « Ridicule ». Voici ce qu’en disait Victor Hugo : «Mais qu’est-ce donc que Voltaire ? Voltaire, disons-le avec joie et tristesse, c’est l’esprit français» (Shakespeare). Le même Hugo qui ajoutait par ailleurs : «L’âme française est plus forte que l’esprit français, et Voltaire se brise à Jeanne d’Arc.» Cela étant dit, pour le centenaire de la mort de Voltaire, Hugo lui fit néanmoins un éloge remarquable.